Un accident rarissime s'est produit en pleine nuit à l'autre bout du monde. Quelques heures plus tard, tous les médias de la planète diffusent une vidéo qui montre la collision du bateau avec un pont. On se croirait dans une superproduction d'Hollywood, sauf que là, c'est pour de vrai. Je suis bluffé. Les meilleurs spécialistes d'effets spéciaux n'auraient pas fait mieux. Celui qui a filmé ça ne pouvait pas savoir ce qui allait arriver. Alors, pourquoi donc filmait il ce pont en pleine nuit ? Il aurait pu filmer pendant 24 heures, des jours, des mois, des années, sans qu'il ne se passe rien. On pourrait croire que c'est rare de tomber sur un tel scoop. Pas si rare que ça, finalement. Un Boeing ne perd pas souvent ses roues au décollage, heureusement. Mais si ça arrive, il y a quelqu'un, par hasard, qui filme l'incident. Les exemples ne manquent pas. C'est comme si on avait des yeux partout et tout le temps. En 1492, quand Christophe Colomb a découvert l'Amérique, c'était un événement historique, mais il n'y avait personne pour voir. Quand l'américain a fait un grand pas (pour l'humanité) sur la lune, il y avait des millions de gens qui regardaient en direct. Je ne sais pas si on réalise à quel point, l'image joue un rôle déterminant dans notre perception du monde. La contrebande à la frontière entre réalité et fiction peut devenir dangereuse.